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Fabrice MAUCCI - Démocratie Ecologie Solidarités
Fabrice MAUCCI - Démocratie Ecologie Solidarités
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7 janvier 2007

Gâchis d'argent public?

Ayant reçu le courriel suivant, très représentatif des remarques ou interrogations des citoyens sur la fiscalité, je tente plus bas une réponse un tout petit peu étoffée d'exemples. Voici le message initial, posté par "Contribuable".

" Et si l'on pouvait empêcher les élus locaux d'écraser fiscalement les habitants en limitant l'augmentation des impôts locaux à celle des revenus ? Et pourquoi les élus ne devraient-ils pas être responsabilisés sur les dépenses non justifiées ? Il y a de réels besoins. Et que font nos élus de l’argent public ?"

Voici une ébauche de réponse.

D'abord, sans vouloir peiner cette personne ni d'autres lecteurs d'ailleurs, reconnaissons qu'en matière d'impôts une partie du problème réside aujourd'hui dans le fait qu'on oublie facilement les missions qu'ils financent, leur caractère essentiel et le fait que tout le monde en profite. A force d'oubli, ou par la conviction erronée qu'une minorité fainéante, privilégiée ou assistée vivrait aux crochets des autres, certains finissent par considérer que l'impôt est un vol et non plus la contribution à un effort collectif, puisque celui-ci n'est plus accepté ou assumé. C'est la place de l'Etat qui est en cause ici. Et le vocabulaire traduit cela.

Sommes-nous "écrasés" par les impôts? Hormis les gens qui ont vu se dégrader rapidement leur situation à cause du chômage, d'une rupture de couple ou d'un autre accident de la vie - et reconnaissons qu'ils peuvent être nombreux dans ce cas - les seules personnes qui me paraissent être injustement frappées par l'impôt sont d'une part les jeunes célibataires qui doivent cumuler le prélèvement avec leurs premières dépenses de logement et d'équipement, et d'autre part les propriétaires d'un logement ancien dans un lieu devenu paradis touristique, qui sont soumises à l'ISF alors qu'elles n'ont presque pas de revenus. Et encore le "bouclier fiscal" de la droite a-t-il cherché à remédier au problème de ces derniers... même si 60% de son revenu en impôt c'est encore énorme quand on vit avec 1500€, et même si à l'inverse ce plafond a surtout fait économiser des centaines de millions d'euros aux 900 familles les plus riches du pays !

Néanmoins, je ne nie pas - puisque je l'évoque sur ce blog en faisant des propositions de réformes - que la fiscalité locale est construite sur des bases désormais totalement obsolètes et injustes. Certes, rappelons que sous Jospin la Taxe d'Habitation et la Taxe Foncière ont été plafonnées pour les très bas revenus, même si j'aurais préféré le courage d'une remise à plat globale. Rappelons aussi que peu de maires utilisent les dégrèvements de 10 ou 15% qu'ils pourraient mettre en place pour les ménages modestes, ce qui en moyenne ne nécessiterait la hausse du taux général que d'1 ou 2 % pour conserver les mêmes recettes.

Pour ce qui est de limiter la hausse des impôts locaux à celle du revenu, et plus généralement à propos de la dépense publique, permettez-moi plusieurs remarques :

1°) je note que la droite utilise depuis peu cette proposition alors qu'elle ne pilote plus qu'une région métropolitaine sur 22, mais elle ne l'évoquait pas quand elle-même augmentait considérablement les impôts locaux entre 1998 et 2004 là où elle était aux commandes;

2°) Les collectivités locales assument aujourd'hui des missions indispensables pour le fonctionnement des territoires, la protection de l'environnement et la cohésion sociale, dont l'Etat s'est largement délesté depuis 2003 sans transmettre l'integralité des ressources correspondantes. Comment faire alors pour limiter la hausse de la fiscalité locale?

3°) Quel revenu prendrait-on comme référence pour y calquer l'évolution de l'impôt? La hausse du revenu moyen est-elle siginicative? Ne faudrait-il pas plutôt individualiser l'impôt local? C'est ce que je souhaite en faisant que les impôts locaux deviennent davantage fonction du revenu et plus progressifs. Le problème de leur lourdeur en serait sûrement fortement atténué.

4°) je mets en garde contre le discours démagogique sur ce point de certains édiles, en prenant l'exemple de ma ville d'Aix-les-Bains. Fiscalement chanceuse parce que deux casinos et la flambée de l'immobilier local lui apportent annuellement 5 millions d'euros de recettes sans effort des ménages ni des entreprises (soit plus que le produit de la Taxe d'Habitation - TH), cette ville est depuis 2001 dirigée par un maire qui dit "baisser les impôts". En fait il a baissé le taux de la TH chaque année depuis 2003 : de 14,05% à 13,97 puis 13,92 puis 13,87%. Le taux de TH a donc baissé chaque année de 0,05 à 0,08 point soit entre 0,3 et 0,55% de sa valeur. Mais dans le même temps, l'Assemblée Nationale revalorisait les bases de calcul de 1,5 à 1,8% contre 1,1% sous Jospin, à inflation égale. Pour les individus, 1,8% de hausse mécanique et 0,55% de baisse du taux cela fait encore 1,25% de hausse du montant à payer ! Certains me rétorqueront que la hausse mécanique votée par le Parlement est là juste pour compenser la hausse des prix, donc pour préserver le pouvoir d'achat de la collectivité, et par conséquent que la baisse du taux de TH reste un effort significatif pour la collectivité... Mais en fait pas tant que cela, car la ville étant "résidentiellement" attractive pour les hauts revenus pour des raisons paysagères et sociales, l'espace communal gonfle ses bases de TH par d'incessantes, nombreuses et très chères constructions. Les ressources "ville" continuent donc d'augmenter de 2,5 à 3% chaque année. La baisse du taux est donc un petit mirage et un gros outil de communication.

5°) La démocratie étant ce qu'elle est, chaque citoyen peut être élu et placé aux commandes d'une collectivité locale si la population le souhaite. Certes, à ce stade on est entouré d'équipes (maigres dans les communes de moins de 10000 habitants), mais on n'est ni infaillible ni forcément "aisé" dans sa situation personnelle. Et on assume une fonction qu'assez peu de monde - il suffit de voir les difficultés pour constituer des listes de candidats -  souhaiterait remplir entièrement. C'est pour ces raisons que je trouve inadaptée la proposition de "responsabiliser les élus sur les dépenses". En revanche, si le fonctionnement des communes, des intercommunalités, des départements et des régions était plus transparent, si la loi rendait plus facile l'accès à certaines informations pour les citoyens et pour les groupes politiques minoritaires dans ces assemblées, la démocratie permettrait un contrôle bien meilleur des dépenses et pourrait stopper plus vite un exécutif qui dérape financièrement sans justification.

6°) D'ailleurs concernant les dépenses publiques dans leur globalité, même si je ne fais pas partie de ceux qui estiment que les effectifs de la fonction publique sont une graisse pléthorique, j'estime qu'en terme de coûts (donc d'impôts) ou d'efficacité de dépense publique (c'est-à-dire le nombre de missions qui peuvent être faites à dépenses constantes), la France gagnerait beaucoup à simplifier le maillage politico-administratif de son territoire. Des intercommunalités de bassin de vie (une ville ou deux et leurs environs ruraux) constitueraient la maille de base, avec une identité communale qui serait préservée à travers le mode de scrutin, nouveau et direct. Les régions constitueraient le seul échelon intermédiaire, mais avec une représentation obligatoire de leurs services aux habitants dans chaque intercommunalité. Les départements disparaîtraient en confiant leurs missions soit aux régions soit aux intercommunalités, selon leur nature et les fonctions déjà habituellement remplies par ces deux échelons : à titre d'exemple, les collèges seraient confiés aux régions puisqu'elles s'occupent déjà des lycées, le versement du RMI ou la protection de la jeunesse à l'échelon local puisque les centres d'action sociale s'y trouvent déjà la plupart du temps.

7°) La suppression des communes aurait pour avantage d'unifier le taux des impôts ménages sur un même bassin de vie. Aujourd'hui, compte tenu qu'elle n'assument financièrement aucun équipement culturel ou social et qu'elle ne sont contraintes à aucune solidarité fiscale, certaines banlieues chics font payer deux fois moins d'impôts à des cadres supérieurs ou à des chefs d'entreprises habitant un pavillon sur 3000m² de terrain que ce que supportent dans la ville-centre, des ménages d'ouvriers ou d'employés logés dans 80m² en quartier HLM.

8°) Enfin, pour revenir et terminer sur le souci de l'usage des deniers publics, je reprends un exemple personnel. A Aix-les-Bains où je suis élu minoritaire, les études, les marchés et les services "externalisés" se multiplient sans que le rapport coût/efficacité ne soit mesuré comme meilleur. Les dépenses très politiques de "cabinet du maire" ont été triplées en 4 ans. Et sur des transactions foncières très éloignées des prix du marché, effectuées sans relation avec l'intérêt communal (économique ou social), cette ville pourrait avoir "évaporé" l'équivalent de 6 ou 7 millions d'euros de son patrimoine depuis fin 2001... Bien sûr, dans l'immédiat, une vente à bas prix reste une vente, donc une rentrée d'argent frais. Les dégâts se verront plus tard. Que dire aussi de la multiplication des postes de "chargé de mission" ou d'encadrement qui soit ne se justifient pas soit, immédiatement après leur création, sont bizarrement peuplés de gens proches du parti, du bureau parlementaire ou des collectivités "amies" du Maire, et dont la performance professionnelle est aléatoire?...

Fabrice MAUCCI

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P
Deux éléments complémentaires peuvent être intéressant : <br /> La hausse des impôts locaux depuis 2004, notamment au niveau régional, s'explique par l'acte II de la décentralisation de Raffarin, qui avait accru les compétences des régions sans augmenter leurs ressources. Pour financer les TER, les personnels des lycées et le développement économique, l'impôt restait le seul moyen, à moins d'abandonner certaines compétences. L'année prochaine, nous aurons le même effet en Savoie, quand il faudra entretenir les routes nationales devenues départementales sans avoir reçu la totalité du budget afférent. Le gouvernement Raffarin avait allégé ses charges et gardé ses recettes, en transférant une partie des compétences aux collectivités. <br /> L'occasion de rappeler les faibles moyens de la Cour des Comptes et de l'IGF en matière d'audit financier des collectivités publiques. Même si Aix a eu droit à la Chambre régionale des comptes plusieurs fois sous Ferrari et Dord... <br /> <br /> - Une proposition, inhabituellement oubliée venant de toi Fabrice, est la création d'un statut de l'élu (point 5.) Cela permettrait un meilleur contrôle des finances personnelles du petit pourcentage qui jette l'opprobre sur tous les autres, mais aussi de faire tourner le personnel politique plus souvent, en le rajeunissant aussi (plus besoin d'être retraité pour être élu!), et n'ayant pas peur d'assainir les finances locales de peur de perdre son mandat / emploi / unique source de revenu... Si Aix-les-B, Modane ou Angoulême n'avaient pas laisser pourrir leurs situations financières, le surendettement ou la cessation de paiements aurait pu être évité.<br /> <br /> Sur ce, bonne année à tous.
Fabrice MAUCCI - Démocratie Ecologie Solidarités
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