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Fabrice MAUCCI - Démocratie Ecologie Solidarités
Fabrice MAUCCI - Démocratie Ecologie Solidarités
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2 mars 2006

Actualiser et enrichir la laïcité pour "(re-)faire Nation"

La Gauche et une très large majorité de Français sont fortement attachées à la notion de laïcité et à ses grands principes. Ces valeurs ont non seulement imprégné notre République, mais elles restent aussi les seules bases qui permettent de (re-)structurer une société qui se méprend sur le sens à donner à sa diversité. Contre le communautarisme ethnico-religieux et l’apartheid qui progressent réellement et que certains souhaiteraient entériner et conforter, nous devons réaffirmer cette laïcité. Mais cela ne doit pas signifier le refus de toute mise à jour législative, rendue nécessaire ne serait-ce que parce que nos « coutumes sociales » et la loi de 1905 ont figé des situations qui créent actuellement des inégalités, concrètes ou perçues, entre les Français.

En cas de victoire de la Gauche en 2007, une grande loi « diversité laïcité citoyenneté » (le 2ème terme étant nécessaire pour passer du 1er au 3ème…), abordant entre autres le droit de vote des étrangers non-européens aux élections locales, est indispensable. Elle pourrait donner aux Français à la fois un puissant signal d’unité et afficher un socle durable de droits et de devoirs mis face à face pour faciliter leur compréhension et l’adhésion du plus grand nombre.

Propositions :

* A. Préciser l’esprit même de la laïcité en rappelant qu’elle est à la fois :

- 1. une traduction de la volonté de « faire Nation », c’est-à-dire de choisir collectivement de vivre dans une même société, au-delà des particularismes, par l’adhésion à des valeurs communes, produits entre autres d’une histoire commune, et à partir desquelles on ambitionne de construire un avenir commun.

- 2. une dissociation institutionnelle entre Etat et « Eglises »

- 3. une affirmation claire de la supériorité, dans la sphère publique ou sociale et en matière de droits individuels et collectifs, du pouvoir politique et de sa loi sur le domaine religieux ;

- 4. une neutralité de la loi et des services de l’Etat ou des collectivités publiques vis-à-vis des cultes et des personnes, ce qui reprend la notion de « reconnaissance d’aucun culte » présente dans le texte de 1905. Elle doit reposer entre autres sur l’absence confirmée de référence à l’adhésion politique, philosophique ou religieuse dans les informations récoltées sur les individus par eux et de différence de traitement fondé sur cette adhésion ;

- 5. l’absence d’expression ostensible, durablement visible ou prosélyte de l’appartenance ou de l’identité ethnique, religieuse et politique dans les lieux où s’exercent les missions publiques ;

- 6. l’absence de relations financières entre la sphère publique et les « Eglises », en particulier s’agissant de l’organisation du culte lui-même. La seule exception à reconnaître (parce qu’elle existe déjà mais de manière inégalitaire), organiser et clarifier, concerne la propriété, la construction et la rénovation de bâtiments à usage cultuel, dans la mesure où il faut tenir compte du patrimoine hérité, des dépenses effectuées à ce titre, et des exigences soulevées par le point suivant ; 

- 7. une garantie apportée par la République à tous les individus qu’ils pourront, de manière égale et dans le respect de l’ordre public, choisir ou exercer librement et dignement un culte, dans la sphère privée et au sein des communautés de croyants. L’alimentation devant être considérée comme un fait privé, les dispositifs de restauration collective devront s’adapter aux demandes particulières autant que possible lorsqu’il n’existe pas d’autre choix de restauration comparable en termes de lieu et de prix (ex : à l’école).

- 8. un engagement et une action identiques de la République contre l’ensemble des discriminations fondées sur l’appartenance ou l’identité ethnique, religieuse et politique.

* B. Uniformiser la laïcité sur l’ensemble du territoire. Le « fonctionnariat des clercs » institué de fait en Alsace et Moselle pour des raisons historiques doit disparaître, même progressivement, si on veut clairement faire passer le message d’une égalité de traitement entre tous les cultes. La « décentralisation » à l’échelle régionale de cet héritage et des dépenses afférentes  ne règlerait pas le problème de principe.

* C. Traiter les signes d’appartenance religieuse avec plus d’égalité, de clarté et de fermeté dans les principes. La loi de 2004 sur les « signes ostensibles à l’école » laisse une latitude pour les « petites croix » alors qu’il n’existe pas de « petite kippa » et qu’il est laborieux d’arbitrer entre le bandana et le foulard islamique. Dans toutes les administrations, dans toutes les entreprises remplissant une mission de service public (et éventuellement dans l’ensemble des entreprises privées sauf autorisation unanime des personnes y travaillant ?), aucun signe religieux visible ne doit être toléré si sa présence est « durable » : un employé, un élève, un acteur ou un spectateur d’un procès seraient concernés par cette interdiction car ils « s’exposent » durablement au regard des autres dans l’enceinte publique. En revanche, le simple usager d’un bureau de poste ou le visiteur ponctuel d’un malade à l’hôpital ou d’une administration ne le seraient pas.

* D. Modifier le calendrier des jours fériés pour tenir compte de la diversité religieuse, sans remettre en cause pour chacun la possibilité de garder des congés de ce type, notamment à des dates identiques au sein d’une même famille.

Sur les 12 jours fériés actuels (oublions le Lundi de Pentecôte), demeureraient automatiquement fériés pour tous le 1er Mai, le 8 Mai, le 14 Juillet et le 11 Novembre, voire le 1er Janvier.

Le reste serait transformé en un contingent de 7 ou 8 jours de « congés pour convenances » que chaque salarié aurait le droit absolu de prendre à la date qui lui convient, avec un préavis d’au moins 3 mois, sans justification et sans que cela puisse faire l’objet d’une opposition de la part de l’entreprise. Ces jours de congé librement disposés par le salarié seraient pris isolément ou par deux, sauf accord plus souple dans l’entreprise permettant par exemple de les globaliser et de les accoler aux congés traditionnels. 

Un tel dispositif serait à coup sûr considéré comme un signe fort de respect des cultures et des croyants « minoritaires » dans notre pays.

* E. Interdire de manière préventive aux partis politiques, à leurs responsables et aux candidats à tout type d’élection, de fonder leur dénomination, leur communication, leur programme ou leur action sur des bases ethniques ou religieuses. Les syndicats et les associations autre que cultuelles conserveraient pour des raisons historiques le droit de se référer à ces bases ethniques ou religieuses, à condition toutefois de rester ouverte à l’adhésion et à la participation active des individus qui s’intéresseraient à leur action sans pouvoir se réclamer de l’appartenance en question. 

* F. Préciser que « Nul ne peut, dans les services publics ou dans les entreprises recevant du public, exiger des conditions d’accueil et de traitement particulier assimilables soit à des faveurs soit à des discriminations pour raisons religieuses, politiques ou syndicales ».

* G. Stopper l’hypocrisie qui découle de la loi de 1905, laquelle interdit de financer les lieux de culte d’une communauté en mal de dignité mais autorise la rénovation des églises par les finances des collectivités locales sous prétexte qu’elles sont propriétaires des murs. Il faut créer un système conciliant l’esprit de séparation financière maximum entre les « églises » et « l’Etat », l’égalité de traitement de tous les cultes pour les dépenses « patrimoniales », et la possibilité d’aider les communautés financièrement démunies à disposer de lieux de culte dignes et donnant sur l’espace public, ce qui peut contribuer à l’ouverture et à la modération.

Un « Fonds national de garantie de la dignité du culte » pourrait être créé, et abondé par les collectivités locales, à hauteur stricte des dépenses effectuées par elles pour l’entretien et la restauration du patrimoine religieux. Ce Fonds servirait à financer totalement ou partiellement l’acquisition de terrains et la construction de bâtiments de culte pour des communautés manquant de lieux de culte adaptés et dignes. Les communes ou les intercommunalités seraient les structures porteuses des demandes de financement auprès du Fonds, de manière automatique quand 1/8ème de leurs élus en fait la demande à l’issue des élections générales. Elles seraient aussi les maîtres d’œuvre des projets et au final les propriétaires ou co-propriétaires des bâtiments ainsi édifiés. Les sommes attribuées au titre du Fonds seraient « ventilées » par l’Assemblée Nationale en fonction des besoins exprimés par les collectivités locales. La cession de ces bâtiments ne pourrait se faire qu’au profit des collectivités locales (pour la part qu’elles ne possèdent pas au départ) ou du Fonds, et uniquement quand l’usage cultuel des bâtiments concernés n’est plus avéré.

par Fabrice MAUCCI et Gwenaëlle HERGOTT

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